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Tshitassinu tshiuetunussit

Tshitassinu tshiuetunussit, notre territoire dans la région du sud.

Depuis toujours, Essipit entretient un lien profond avec son territoire, que nous nommons Nitassinan, « notre territoire » en français. Ce lien se manifeste, entre autres, dans les pratiques traditionnelles, les savoirs transmis de génération en génération et dans la mémoire vivante des lieux. Parmi les différentes parties du Nitassinan, Tshitassinu tshiuetunussit « notre territoire, dans la région du sud » en français, occupe une place particulière.

Qu’est-ce que Tshitassinu tshiuetunussit (Nitassinan partie sud-ouest)?

Historiquement occupée et fréquentée par de nombreuses familles innues, Tshitassinu tshiuetunussit est un territoire partagé par trois Premières Nations innues : Essipit, Mashteuiatsh (Pekuakamiulnuatsh) et Pessamit.

D’une superficie de 21 106 km2, il se situe au sud du Nitassinan des Pekuakamiulnuatsh et à l’ouest de celui d’Essipit et de Pessamit. Il correspond approximativement aux bassins versants des rivières qui se jettent dans le fleuve Saint-Laurent entre la rivière Saint-Maurice et la rivière Saguenay, en englobant une partie de la réserve faunique des Laurentides, le Parc national de la Jacques-Cartier et le parc national des Grands-Jardins.

Aujourd’hui, Tshitassinu tshiuetunussit est reconnu dans le cadre des négociations territoriales menées avec les gouvernements du Québec et du Canada, plus précisément à travers l’Entente de principe d’ordre général (EPOG), signée en 2004.

Qu’est-ce l’EPOG?

L’EPOG est une entente qui jette les bases d’un futur traité entre les trois Premières Nations innues, celle de Nutashkuan et les gouvernements du Canada et du Québec. Elle affirme la reconnaissance mutuelle des droits ancestraux et territoriaux, dont la pratique innu-aitun (la chasse, la pêche, la trappe, la cueillette, ainsi que les autres activités traditionnelles). L’EPOG reconnaît aussi que Tshitassinu tshiuetunussit est un territoire commun aux trois Premières Nations qui travaillent à établir une gouvernance partagée fondée sur l’autonomie gouvernementale.

À quoi ressemble Tshitassinu tshiuetunussit sur une carte?

Sur la carte, on peut visualiser clairement le territoire des trois Premières Nations qui s’étend vers la région de la Capitale-Nationale.
Ce territoire regroupe :


Empreintes innues et lien d’attachement au territoire

Tshitassinu tshiuetunussit fait historiquement partie du territoire ancestral des Innus. Grâce à la tradition orale et aux récits transmis de génération en génération, ainsi qu’à l’analyse de cartes anciennes et d’écrits produits dès les premiers contacts avec les Européens, plusieurs centaines de toponymes innus ont pu être recensés sur ce territoire. Ces noms de lieux expriment un lien profond avec le territoire, une connaissance pure des milieux naturels et une occupation ancienne structurée autour des cycles saisonniers.

Cette partie commune de notre Nitassinan était occupée et utilisée par les ancêtres de nos trois communautés identifiées sous le nom de «Montagnais» par les premiers explorateurs. L'un des principaux sites de rassemblement estival innu se trouvait dans la région de Québec, connue sous le nom de Uepishtikueiau, ce qui signifie « là où le fleuve se rétrécit ». Ce toponyme désigne précisément le secteur de la confluence du fleuve Saint-Laurent et de la rivière Saint-Charles, à l’endroit où s’est établie la ville de Québec. Ce site stratégique, toujours nommé ainsi par les Innus, illustre l’importance des confluences et des réseaux hydrographiques dans les déplacements et les rassemblements traditionnels.

La présence innue dans les zones plus au sud de Tshitassinu tshiuetunussit, en particulier dans les secteurs de Cap Tourmente et Beauport, est également attestée dans plusieurs sources historiques. On y rapporte la pratique de la chasse à l’orignal, à l’oie sauvage, à l’outarde, à la sarcelle et autres gibiers par les Montagnais, ainsi que leur mention dans les registres de l’état civil de Beauport, ce qui confirme une occupation effective et reconnue de ces lieux à l’époque coloniale. 
Une grande partie de la toponymie innue a toutefois été effacée ou transformée par les politiques coloniales d’appropriation du territoire, contribuant à invisibiliser notre présence dans plusieurs régions. Depuis quelques années, des efforts sont déployés pour faire connaître, transmettre et officialiser les noms innus d’origine. Parmi les exemples déjà reconnus figurent :

Certains noms d’usage traditionnel, comme Ishkuateiapishkau, au Cap Tourmente, dans la MRC de la Côte-de-Beaupré – signifiant « les roches brûlées », témoignent d’une mémoire innue liée à un territoire autrefois fréquenté, bien qu’ils ne soient pas encore officialisés dans les banques toponymiques. Ces noms rappellent que l’innu-aimun continue d’exister sur le territoire et que notre mémoire y demeure vivante.

Par ailleurs, il est reconnu que d’autres Premières Nations ont également fréquenté certaines portions de ce territoire, notamment dans les zones méridionales et côtières. Le projet de Traité Petapan tient compte de cette réalité, dans un esprit de respect et de reconnaissance des relations historiques entre Nations.
Aujourd’hui encore, des familles innues poursuivent leurs activités traditionnelles sur Tshitassinu tshiuetunussit, transmettent leurs savoirs et entretiennent un lien renouvelé avec le Nitassinan.  

Vers une gouvernance partagée

Cette présence historique, attestée par la langue, la toponymie et les récits oraux, se traduit aujourd’hui par un engagement formel de nos Nations à exercer ensemble nos responsabilités ancestrales sur Tshitassinu tshiuetunussit, afin d’assurer la continuité de notre identité et de notre mode de vie.

Nos trois Premières Nations ont entrepris une démarche commune visant à établir une structure de gouvernance partagée sur Tshitassinu tshiuetunussit, afin d’assurer la gestion responsable du territoire, la protection de la Terre-Mère et la continuité d’innu-aitun. Cette gouvernance repose sur l’unité, la responsabilité partagée et l’exercice du droit inhérent à l’autonomie gouvernementale.